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Prix
Empécheurs de penser rond
-
à l'est des rêves : réponses Even aux crises systémiques
Nastassja Martin
- Empécheurs de penser rond
- Les empêcheurs de penser en rond
- 1 Septembre 2022
- 9782359251951
Après avoir travaillé en Alaska avec le peuple Gwich'in, Nastassja Martin a franchi le détroit de Béring pour entamer une recherche comparative au Kamtchatka. Pendant l'époque soviétique, les Even, peuple nomade d'éleveurs de rennes, ont été sédentarisés dans des fermes collectives. Après la chute du régime, beaucoup ont continué d'être les bergers des rennes qui ne leur appartenaient plus, les troupeaux étant aux mains d'entreprises privées. Depuis l'ouverture de la région en 1991, les anciens kolkhozes du Kamtchatka se transforment en plateformes touristiques.
En 1989, juste avant la chute de l'Union soviétique, une famille even aurait décidé de repartir en forêt, recréer un mode de vie autonome fondé sur la chasse, la pêche et la cueillette. Était-ce une légende ? Comment un petit collectif violenté, spolié, asservi par les colons avant d'être oublié de la grande histoire s'est-il saisi de la crise systémique pour regagner son autonomie ? Comment a-t-il fait pour renouer les fils ténus du dialogue quotidien qui le liait aux animaux et éléments, sans le secours des chamanes éliminés par le processus colonial ? Quelles manières de vivre les Even d'Icha ont-ils réinventées, pour continuer d'exister dans un monde rapidement transformé sous les coups de boutoir de l'extractivisme et du changement climatique ?
Dans ce livre, où les rêves performatifs et les histoires mythiques répondent aux politiques d'assimilation comme au dérèglement des écosystèmes, l'autrice fait dialoguer histoire coloniale et cosmologies autochtones en restituant leurs puissances aux voix multiples qui confèrent au monde sa vitalité. -
La religion à l'épreuve de l'écologie : Exégèse et ontologie
Bruno Latour
- Empécheurs de penser rond
- Les empêcheurs de penser en rond
- 15 Février 2024
- 9782359252705
De novembre 2020 à janvier 2021, Bruno Latour s'est prêté au jeu de relire un texte qu'il avait depuis longtemps oublié : sa thèse de doctorat. Reproduite en intégralité en seconde partie de cet ouvrage, elle a constitué le point de départ des entretiens qui la précèdent (menés par plusieurs sociologues et théologiens). L'enjeu de ces entretiens était d'aborder une question aussi importante que controversée : quel rôle a joué la " parole religieuse " dans la trajectoire intellectuelle de Bruno Latour ? Les méthodes exégétiques qu'il découvre en travaillant le texte biblique, sans cesse transposées et rejouées tout au long de ses recherches ultérieures (sur la science, le droit, les technologies, etc.), apparaissent ici comme un motif essentiel de son oeuvre - et ce, indépendamment de toute perspective confessionnelle. La religion est, pour Bruno Latour, un " mode d'existence " parmi d'autres, ni plus ni moins important. Ces dernières années, l'émergence d'un Nouveau Régime Climatique et l'irruption inquiétante de Gaïa ont été l'occasion, pour lui, de rouvrir cette question.
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Où suis-je ? leçons du confinement à l'usage des terrestres
Bruno Latour
- Empécheurs de penser rond
- 21 Janvier 2021
- 9782359252019
Depuis la terrible expérience du confinement, les États comme les individus cherchent tous comment se déconfiner, en espérant revenir aussi vite que possible au " monde d'avant " grâce à une " reprise " aussi rapide que possible. Mais il y a une autre façon de tirer les leçons de cette épreuve, en tout cas pour le bénéfice de ceux que l'on pourrait appeler
les terrestres. Ceux-là se doutent qu'ils ne se déconfineront pas, d'autant que la crise sanitaire s'encastre dans une autre crise bien plus grave, celle imposée par le Nouveau Régime Climatique. Si nous en étions capables, l'apprentissage du confinement serait une chance à saisir : celle de comprendre enfin où nous habitons, dans quelle terre nous allons pouvoir enfin nous envelopper - à défaut de nous développer à l'ancienne !
Où suis-je ? fait assez logiquement suite au livre précédent,
Où atterrir ?Comment s'orienter en politique. Après avoir atterri, parfois violemment, il faut bien que les terrestres explorent le sol où ils vont désormais habiter et retrouvent le goût de la liberté et de l'émancipation mais autrement situées. Tel est l'objet de cet essai sous forme de courts chapitres dont chacun explore une figure possible de cette métaphysique du déconfinement à laquelle nous oblige l'étrange époque où nous vivons. -
Les morts à l'oeuvre
Vinciane Despret
- Empécheurs de penser rond
- Les empêcheurs de penser en rond
- 5 Janvier 2023
- 9782359252446
Les morts peuvent faire agir les vivants, mobiliser ceux qui restent autour de questions qui touchent à la vie collective, à l'érosion des liens sociaux, à des événements qui les dépassent ou dont l'ampleur ou la violence pourrait les détruire, annihiler ce à quoi ils sont attachés. Les morts peuvent aider les vivants à transformer le monde. Dans ce livre, Vinciane Despret nous raconte cinq histoires où des morts proches ou éloignés dans le temps ont obligé les vivants à leur donner une nouvelle place. Ces morts " insistent " parce qu'il y a eu quelque chose d'injuste dans le sort qui a été le leur : victimes de violence, commandos d'Afrique et de Provence, sacrifiés politiques à la raison du plus fort... Ceux qui restent ont décidé de répondre à cette insistance en commandant une oeuvre grâce à un protocole politique et artistique nommé le programme des Nouveaux Commanditaires. Ce protocole consiste à choisir un artiste et à décider en commun d'une oeuvre. Il va transformer en profondeur les commanditaires.
Cela n'a rien à voir avec le deuil dans sa forme autoritaire (quand les théories psychologiques enjoignent à l'oubli). C'est avec la vie, celle qui n'est plus mais qui est encore d'une autre manière, celle qui résiste à son effacement, que ce faire avec provoque une étonnante série de métamorphoses. -
Mémo sur la nouvelle classe écologique : comment faire émerger une classe écologique consciente
Bruno Latour, Nikolaj Schultz
- Empécheurs de penser rond
- 6 Janvier 2022
- 9782359252194
À quelles conditions l'écologie, au lieu d'être un ensemble de mouvements parmi d'autres, pourrait-elle organiser la politique autour d'elle ? Peut-elle aspirer à définir l'horizon politique comme l'ont fait, à d'autres périodes, le libéralisme, puis les socialismes, le néolibéralisme et enfin, plus récemment, les partis illibéraux ou néofascistes dont l'ascendant ne cesse de croître ? Peut-elle apprendre de l'histoire sociale comment émergent les nouveaux mouvements politiques et comment ils gagnent la lutte pour les idées, bien avant de pouvoir traduire leurs avancées dans des partis et des élections ?
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De la génération : Enquête sur sa disparition et son remplacement par la production
Emilie Hache
- Empécheurs de penser rond
- Les empêcheurs de penser en rond
- 11 Janvier 2024
- 9782359252613
Les sociétés industrielles, extractivistes et productivistes, ne manifestent aucun souci pour la reproduction de leurs conditions d'existence car elles ont oublié que la perpétuation du monde avait besoin d'être accompagnée par celles et ceux qui le composent. Mais cela a-t-il toujours été le cas ? Et quel rôle les rapports de genre ont-ils joué dans cette histoire ? L'autrice explore les manières de concevoir cette perpétuation dans différentes sociétés pré- et non industrielles, en Grèce antique, en Europe médiévale ou encore dans certaines sociétés matrilinéaires contemporaines. On découvre qu'une importance majeure y est accordée aux pratiques (re)génératives, chargées d'assurer le renouvellement de la société tout entière - travail de subsistance, reproduction des générations, liens avec les invisibles, etc.
L'avènement du christianisme et du nouveau rapport au monde qu'il a institué a tout bouleversé. Le souci de la (re)génération du monde a progressivement été remplacé par l'idée d'un monde créé une fois pour toutes, n'ayant plus besoin d'être perpétué au quotidien - la providence infinie se chargeant de tout. Est-il possible de réinventer des pratiques génératives mettant fin à notre illimitisme, de manière non coercitive et égalitaire ? Tel est l'enjeu central de cette enquête, exigeant d'en finir avec le passé que la société industrielle s'est inventé pour justifier sa course en avant effrénée.
Ce livre apporte une contribution majeure à l'écoféminisme, en retrouvant la question de la génération derrière l'identification des femmes et de la nature dans la modernité. -
Gaïa, Terre vivante : Histoire d'une nouvelle conception de la Terre
Sébastien Dutreuil
- Empécheurs de penser rond
- Les empêcheurs de penser en rond
- 21 Mars 2024
- 9782359251937
Qui est Gaïa ? Une proposition scientifique ou un nouveau rapport spirituel, philosophique et politique à la nature ? Gaïa est la divinité grecque qui a surgi après Chaos pour engendrer le monde. Mais c'est aussi le nom que James Lovelock, chimiste et ingénieur anglais, et Lynn Margulis, microbiologiste américaine, ont donné dans les années 1970 à l'hypothèse d'une régulation de l'habitabilité de la Terre par les êtres vivants. Cette figure clivante a généré des débats passionnés dans les sciences, en philosophie, dans la littérature écologiste.
Les critiques la résument à l'idée d'un altruisme biologique global, invalidé par la sélection naturelle et dont il ne resterait que de vaines élucubrations
New Age. Lovelock estime quant à lui que l'ensemble de ses réflexions spéculatives sur la Vie et la Terre, élaborées depuis le laboratoire construit dans son garage au fond de la campagne anglaise, est à même de transformer les sciences et la conception moderne de la Nature.
Aucun de ces récits n'est satisfaisant. Ils ne permettent pas de restituer l'immense influence de Gaïa sur les sciences de l'environnement, de la constitution des sciences du système terre au concept d'Anthropocène. Ils masquent les enjeux philosophiques et politiques les plus importants de Gaïa. Cette enquête historique et philosophique cartographie les controverses et propose un nouveau récit. Gaïa est une nouvelle conception de la Terre, un cadre pour penser les pollutions de l'environnement global (climat, ozone, insecticides, pluies acides, etc.). Malgré les réticences qui subsistent à l'évocation du nom de Gaïa, nous pouvons enfin saisir l'influence profonde qu'elle a eue sur les savoirs, les philosophies et les politiques contemporaines de la Terre. -
Quand les espèces se rencontrent
Donna Haraway
- Empécheurs de penser rond
- 30 Septembre 2021
- 9782359252071
" Il y a maintenant presque huit ans, je me suis retrouvée de façon inattendue éperdument amoureuse d'une chienne rouge piment que j'ai appelée Cayenne. "
C'est en partant des gestes les plus ordinaires du quotidien et non pas de grands principes que Donna Haraway nous invite à penser notre relation aux espèces compagnes. Ces espèces avec lesquelles nous " partageons le pain ", depuis les micro-organismes qui nous peuplent jusqu'aux animaux de compagnie.
Cet enchevêtrement nous conduit auprès de bouledogues français à Paris, à des projets concernant les prisonniers du Midwest, à des analyses coûts-bénéfices dans la culture marchande autour des chiens, à des souris de laboratoire et des projets de recherche en génétique, sur des terrains de baseball et d'agility, auprès de baleines munies de caméras au large de l'Alaska, sur des sites industriels d'élevage de poulets, etc.
Il s'agit ici non pas de domestication, de contrôle ou de rachat de la dette mais de contact. Quelle est la valeur ajoutée du contact ? Que nous apprennent à sentir et à faire les " zones de contact " ? Loin de tout retour romantique à une rencontre sauvage, dénuée d'intérêts et de contamination biopolitique, prendre soin du contact entre espèces " entraîne " à un perpétuel zigzag entre ce qui nous affecte, nous rattache, nous rend interdépendants, simultanément robustes et vulnérables. -
Apprendre à bien parler des sciences : la vierge et le neutrino
Isabelle Stengers
- Empécheurs de penser rond
- Les empêcheurs de penser en rond
- 17 Mai 2023
- 9782359252583
Les scientifiques se sentent trahis. Ils dénoncent une montée de l'irrationalité et du relativisme sceptique. Mais ils savent aussi que leur ancienne alliance avec l'État est morte : celui-ci ne rêve plus que de brevets, de percées technologiques. Les scientifiques sont désormais de plus en plus dépendants de financements extérieurs rarement désintéressés et d'accords avec des entreprises privées dans le cadre de la nouvelle " économie de la connaissance ". Par ailleurs, ils sont aussi confrontés à un nouveau type de " public " posant des questions gênantes au lieu de faire confiance au progrès. Ce public, indiscipliné mais pertinent, pourrait bien être un allié indispensable pour les scientifiques menacés d'asservissement, mais une telle alliance a un prix : elle demande qu'ils renoncent aux mots d'ordre qui font d'eux la tête pensante d'une humanité en progrès.
Le pari de ce livre est que les scientifiques peuvent y renoncer. Au-delà, il tente de forger les mots qui permettent d'affirmer ensemble, sans confusion ni hiérarchie, des pratiques qui divergent, par exemple celle des pèlerins s'adressant à la Vierge et celle qui a autorisé à attribuer une masse au neutrino. Il plaide pour une écologie des pratiques dont les praticiens sauraient que ce qui les fait penser, sentir et hésiter ne leur appartient pas. -
Les faiseuses d'histoires ; que font les femmes à la pensée ?
Vinciane Despret, Isabelle Stengers
- Empécheurs de penser rond
- 14 Février 2013
- 9782359250565
Les femmes ne sont jamais contentes. À témoin, Virginia Woolf qui appela les femmes à se méfier de l'offre généreuse qui leur était faite : pouvoir, comme les hommes, faire carrière à l'université. Il ne faut pas, écrivit-elle, rejoindre cette " procession d'hommes chargés d'honneurs et de responsabilités " ; méfiez-vous de ces institutions où règnent le conformisme et la violence. Vinciane Despret et Isabelle Stengers se sont posés la question : qu'avons-nous appris, nous les filles infidèles de Virginia qui avons, de fait, rejoint les rangs des " hommes cultivés " ? Et comment prolonger aujourd'hui le cri de Woolf, " Penser nous devons ", dans une université désormais en crise ? Ces questions, elles les ont relayées auprès d'autres femmes. Leurs témoignages ont ouvert des dimensions inattendues. Elles ont raconté des anecdotes, des perplexités, des histoires, des événements ou des rencontres qui les ont rendues capables non seulement de dire non et de résister, mais de continuer à penser et à créer dans la joie et dans l'humour. Et surtout, ces femmes, comme toujours, ont fait des histoires...
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Le retour du monde magique
Fanny Charrasse
- Empécheurs de penser rond
- Les empêcheurs de penser en rond
- 28 Septembre 2023
- 9782359252521
Comment un commandant de police, une responsable qualité et un éducateur sportif en viennent-ils à quitter leur emploi pour devenir magnétiseurs ? Pourquoi le magnétisme, assimilé à une " vieille erreur " par les scientifiques désignés par Louis XVI pour en faire l'examen à la veille de la Révolution, est-il de mieux en mieux toléré aujourd'hui ? L'ambition de ce livre est de comprendre et d'expliquer sociologiquement ce phénomène. Pour ce faire, il présente les histoires de vie de personnes devenues magnétiseuses. Il décrit concrètement leur pratique qui mobilise de l'énergie et parfois des esprits. Grâce à une plongée dans cinquante ans d'archives, il revient ensuite sur les poursuites qu'ont subies les magnétiseurs jusque dans les années 1980 pour exercice illégal de la médecine, et sur la façon dont ils y ont répondu. Enfin, à travers des entretiens avec des médecins, des membres du ministère de la Santé et des observations en oncologie-radiothérapie, il analyse la place que tient aujourd'hui le magnétisme dans la société française.
Revenant sur une autre enquête, réalisée auprès de chamanes de la côte nord péruvienne, la fin de l'ouvrage montre que s'intéresser à des pratiques magiques suppose d'étudier leur conversion (partielle) au " naturalisme ", cette ontologie des " Modernes " dont l'avènement a donné lieu à l'émergence de l'opposition entre la nature et la culture. Cela oblige à en décrire la métamorphose : la manière dont le naturalisme est en train de devenir plus " réflexif ", c'est-à-dire conscient de lui-même et ouvert à d'autres ontologies. -
Immersion
Hélène Artaud
- Empécheurs de penser rond
- Les empêcheurs de penser en rond
- 23 Février 2023
- 9782359252378
Les Occidentaux ont toujours considéré qu'il était normal d'avoir
peur de l'océan, de vouloir le
dominer et d'
exploiter inconsidérément ses ressources par le recours à la technique : navires, instruments de navigation, cartes. Nous avons longtemps cru qu'il n'existait pas d'autres rapports possibles à la mer et que notre approche matérialiste était universelle. Or, l'exploration du Pacifique va tout changer.
Quand les premiers explorateurs occidentaux sont arrivés dans les îles du Pacifique, ils ne pouvaient pas comprendre comment les " natifs " s'étaient déplacés sur des milliers de kilomètres, d'îles en îles, sans aucune médiation technologique comparable aux leurs. L'espace objectif des cartes modernes ne correspondait pas à la perception spatiale qui était la leur. La distance n'était pas pour eux une donnée stable. D'où une " cartographie sensorielle " où les repères sont les bancs de poissons, les volées d'oiseaux, le bois flotté, les mouvements des vagues, le ciel, etc. Un groupement de requins, des poissons volants, des méduses, des marsouins, des oiseaux, la couleur de l'eau étaient autant d'indices qui permettaient de se situer. C'est cette
perspective pacifique qu'Hélène Artaud nous fait découvrir.
Cette rencontre a-t-elle provoqué chez les Occidentaux un tournant écologique ? Si la rencontre avec le Pacifique a pu changer la perception occidentale de l'océan au point d'en faire ce milieu intime, vulnérable et sensible, l'anthropologue interroge la profondeur de ce changement. Le " tournant " océanique des Modernes est peut-être moins l'annonce d'une rupture que l'indice d'une continuité... -
Friction : délires et faux-semblants de la globalité
Anna lowenhaupt Tsing
- Empécheurs de penser rond
- 3 Septembre 2020
- 9782359251807
Friction : que se passe-t-il dans les " zones-frontières " où se développe une économie sauvage, ravageant les ressources, les plantes, les animaux, les forêts et les cultures humaines ? Où aucun droit ne limite plus la puissance de bandes armées qui constituent l'avant-garde d'un capitalisme à la fois moderne et archaïque ? Anna Tsing nous emmène à Bornéo chez les Dayaks meratus, mais ce pourrait aussi bien être en Amazonie au Brésil.
Friction : comment entendre le cri de tous ceux et celles - humains et non-humains - qui disparaissent dans un maelstrom de destructions où la forêt laisse place à des plantations de palmiers à huile ? Comment apprendre à regarder une forêt que l'on croyait sauvage comme un espace social, habité ? Comment faire l'histoire de la botanique en redonnant aux peuples indigènes le rôle qui a été le leur ?
Friction : comment des lycéens et des étudiants indonésiens amoureux de la nature ont-ils appris, pas à pas, à refaire de la politique sous la dictature ? Comment les alliances les plus boiteuses peuvent-elles être fécondes ?
Friction : comment faire de l'ethnographie sans se plier aux règles de l'orthodoxie académique, sans théorie à vérifier, mais en fabulant, en rendant perceptibles des aspects de la réalité souvent considérés comme accessoires ? Avec Anna Tsing, il faut apprendre à mettre en suspens nos routines perceptives et nos jugements normatifs, apprendre à sentir et ressentir, à développer une culture de l'attention, apprendre avec ce qui la fait hésiter, avec ce qui l'oblige à multiplier les manières de raconter, les méthodes ethnographiques. -
La dignité ou la mort : éthique et politique de la race
Norrman Ajari
- Empécheurs de penser rond
- 14 Février 2019
- 9782359251463
L'objet de ce livre est de montrer que la dignité présente un autre visage lorsqu'elle émerge d'une histoire de la déshumanisation. À travers une analyse critique de la tradition philosophique européenne, Norman Ajari élabore une conception radicalement nouvelle de la dignité, entendue ici comme la capacité à se tenir debout entre la mort et la vie.
Être africain ou afrodescendant, c'est provenir d'un peuple dont l'humanité fut contestée sur les plans juridique, scientifique, philosophique, théologique, économique, psychiatrique. On n'en continue pas moins à exiger des Afrodescendants qu'ils cessent de " ressasser ", de " ruminer " l'histoire coloniale, répétant ainsi une vieille injonction esclavagiste à l'oubli des ancêtres et à la méconnaissance de la communauté d'origine.
Pourquoi prendre la question sous l'angle de la dignité ? La dignité est ce que le Blanc
essaie d'abolir lorsqu'il exerce sa violence sur le Noir. Mais c'est aussi ce dont le Blanc
se prive lui-même lorsqu'il exerce sa violence sur le Noir. Enfin, c'est ce que le Noir
réaffirme collectivement lorsqu'il s'engage contre la domination blanche. Lorsque la dignité d'un jeune Noir est prise d'assaut, lorsqu'il est violé ou assassiné par les représentants de l'État, c'est une longue histoire de luttes, de conquêtes et d'affirmation d'une humanité africaine qui vacille et tremble sur ses bases.
La Dignité ou la Mort propose une implacable analyse critique de la tradition philosophique européenne. Mais c'est pour mieux renouer avec l'histoire méconnue de la pensée radicale des mondes noirs. Les révoltes d'esclaves, la négritude, les usages révolutionnaires du christianisme en Amérique du Nord et en Afrique du Sud, l'ontologie politique seront autant d'étapes d'un véritable parcours de libération.
La dignité est la capacité de l'opprimé à tenir debout entre la vie et la mort. -
Quand le loup habitera avec l'agneau
Vinciane Despret
- Empécheurs de penser rond
- 28 Mai 2020
- 9782359251838
Les animaux ont bien changé au cours des dernières années. Les babouins mâles qui semblaient tellement préoccupés de hiérarchie et de compétition nous disent à présent que leur société s'organise autour de l'amitié avec les femelles. Les corbeaux, qui avaient si mauvaise réputation, nous apprennent que, quand l'un d'eux trouve de la nourriture, il en appelle d'autres pour la partager. Les moutons, dont on pensait qu'ils étaient si moutonniers, n'ont aujourd'hui plus rien à envier aux chimpanzés du point de vue de leur intelligence sociale. Et nombre d'animaux qui refusaient de parler dans les laboratoires behavioristes se sont mis à entretenir de véritables conversations avec leurs scientifiques. Ces animaux ont été capables de transformer les chercheurs pour qu'ils deviennent plus intelligents et apprennent à leur poser, enfin, de bonnes questions. Et ces nouvelles questions ont, à leur tour, transformé les animaux...
Depuis la première édition de ce livre, les uns et les autres ont continué à se surprendre et un chapitre inédit nous fait découvrir leurs avatars les plus récents. Aujourd'hui, des rats rient dans leurs laboratoires, des perroquets australiens apprennent, avec leurs scientifiques, à mieux collaborer. Quant aux babouins, on découvre que certains auraient domestiqué des chiens et apprivoisé des chats ! Ce livre fourmille de mille exemples et histoires et nous invite à nous demander si tous ces êtres ne sont pas occupés à nous poser une question politique. -
Le cri de Gaïa ; penser la Terre avec Bruno Latour
Frédérique Aït-Touati, Emanuele Coccia
- Empécheurs de penser rond
- 21 Janvier 2021
- 9782359251982
Bruno Latour inspire depuis plusieurs décennies le travail de philosophes, historiennes et historiens, sociologues, éthologues, anthropologues et artistes dans le monde entier.
Face à Gaïa occupe une place particulière dans son oeuvre : ce livre appelle à une réaction au-delà de la simple assimilation théorique.
Ce qui a l'apparence d'une question purement scientifique est en vérité un différend d'ordre politique. L'hypothèse Gaïa de Lovelock et Margulis représente l'effort pour reconnaître que la Terre est un sujet qui agit et intervient avec force dans notre histoire. Nous sommes moins sur la Terre que face à elle. La question écologique est moins celle du respect du vivant que celle de l'acceptation et de la représentation de l'actrice politique par excellence : notre planète. Reconnaître sa puissance d'agir signifie faire coïncider la protagoniste de l'histoire de la vie avec sa scène.
Autour de ce défi, des spécialistes de différentes disciplines scientifiques et artistiques se sont réunis. Chacun des auteurs raconte sa rencontre avec une des propositions contenues dans
Face à Gaïa, comment elle l'a interrogé, bouleversé, voire contrarié. On ne fera face à Gaïa qu'en entremêlant les savoirs issus de l'exploration de cette " zone critique " (autre nom de Gaïa), les performances des artistes, la philosophie, la métaphysique et la théologie.
Gaïa en sort encore plus fascinante, provocante et menaçante. -
Réactiver le sens commun ; lecture de Whitehead en temps de débâcle
Isabelle Stengers
- Empécheurs de penser rond
- 9 Janvier 2020
- 9782359251746
Opposer les scientifiques à un " public prêt à croire n'importe quoi " - et qu'il faut maintenir à distance - est un désastre politique. " Ceux qui savent " deviennent les bergers d'un troupeau tenu pour foncièrement irrationnel. Aujourd'hui, une partie du troupeau semble avoir bel et bien perdu le sens commun, mais n'est-ce pas parce qu'il a été humilié, poussé à faire cause commune avec ce qui affole leurs bergers ? Quant aux autres, indociles et rebelles, qui s'activent à faire germer d'autres mondes possibles, ils sont traités en ennemis.
Si la science est une " aventure " - selon la formule du philosophe Whitehead -, ce désastre est aussi scientifique car les scientifiques ont besoin d'un milieu qui rumine (" oui... mais quand même ") ou résiste et objecte. Quand le sens commun devient l'ennemi, c'est le monde qui s'appauvrit, c'est l'imagination qui disparaît. Là pourrait être le rôle de la philosophie : souder le sens commun à l'imagination, le réactiver, civiliser une science qui confond ses réussites avec l'accomplissement du destin humain.
Depuis Whitehead le monde a changé, la
débâcle a succédé au
déclin qui, selon lui, caractérisait " notre " civilisation. Il faut apprendre à vivre sans la sécurité de nos démonstrations, consentir à un monde devenu problématique, où aucune autorité n'a le pouvoir d'arbitrer, mais où il s'agit d'apprendre à faire sens en commun. -
Médecins et sorciers
Isabelle Stengers, Tobie Nathan
- Empécheurs de penser rond
- 7 Juillet 2016
- 9782359251333
Nous croyons savoir ce que font les guérisseurs : ils s'appuient sur les croyances (irrationnelles) des patients et agissent de manière " symbolique " ; s'ils obtiennent des résultats, c'est grâce à leur capacité d'écoute. Nous croyons aussi savoir ce qu'est la médecine moderne : une médecine très technique, rationnelle, mais trop peu à l'écoute des patients.Dans ce livre, Tobie Nathan et Isabelle Stengers montrent que cette opposition est trompeuse. Selon Tobie Nathan, les guérisseurs sont intéressants justement parce qu'ils n'écoutent pas les patients : les techniques de " divination " s'opposent à celles du " diagnostic ". En interrogeant l'invisible, en identifiant ses intentions, ceux-ci construisent de véritables stratégies thérapeutiques dont les Africains sont des virtuoses. La médecine moderne se caractérise, elle, par son empirisme et non pas par sa rationalité. Le thème de la rationalité sert à combattre les autres techniques de soin.Ce livre, véritable manifeste de l'ethnopsychiatrie, bouleversera tous ceux qui ont affaire avec le soin et la médecine. Au-delà, l'objectif du psychologue et de la philosophe est de nous obliger à repenser le rapport entre la culture occidentale et les autres. Cette nouvelle édition est complétée par deux textes où les auteurs répondent à leurs contradicteurs.
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Sur le culte moderne des dieux faitiches ; iconoclash
Bruno Latour
- Empécheurs de penser rond
- 12 Mars 2015
- 9782359251074
Ce livre marque une étape clef dans le projet que poursuit Bruno Latour : faire une anthropologie positive des sociétés occidentales. Il se compose de deux textes qui remettent en cause deux notions : celle de " croyance " et celle de " critique ". Le premier texte est le résultat d'un long stage dans la consultation d'ethnopsychiatrie du Centre Devereux, le second (inédit en français) est l'introduction au catalogue de l'exposition Iconoclash dont Bruno Latour a été le commissaire en 2002.Avec la notion de faitiche, Latour montre qu'il est possible de respecter les sciences sans avoir à les opposer aux délires de la subjectivité. Avec la notion d'iconoclash, il propose de suspendre le geste critique pour en étudier l'impact. Grâce à ces bricolages conceptuels, il devient possible de prendre pour objet d'étude deux des principales ressources que les modernes ont mises en oeuvre pour se distinguer des autres : la critique de la croyance et la croyance en la critique. Résultat : le monde ne se sépare plus entre ceux qui baigneraient dans de chaudes illusions et ceux qui ne connaîtraient que la froide raison. Avec ce mélange d'audace intellectuelle et d'humour qui en fait l'un des penseurs les plus connus au monde, Bruno Latour crée de nouveaux outils pour nous comprendre nous-mêmes et rouvrir la discussion avec les autres cultures.
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Du jardin d'Éden à la " petite république " de la ferme de Jefferson, des hortillonnages médiévaux d'Amiens à l'agriculture urbaine de Savannah, en passant par les kibboutz, les jardins ouvriers ou les jardins partagés urbains, et bien d'autres épisodes tous plus inventifs les uns que les autres, ce livre examine ce qui, dans les relations entre l'agriculteur ou le jardinier et la terre cultivée, favorise la formation de la citoyenneté, une puissance de changement considérable.
On a l'habitude de penser que la démocratie moderne vient des Lumières, de l'usine, du commerce, de la ville. Opposé au citadin et même au citoyen, le paysan serait au mieux primitif et proche de la nature, au pire arriéré et réactionnaire.
À l'opposé de cette vision, ce livre examine ce qui, dans les relations entre les cultivateurs et la terre cultivée, favorise l'essor des valeurs démocratiques et la formation de la citoyenneté. Défile alors sous nos yeux un cortège étonnant d'expériences agricoles, les unes antiques, les autres actuelles ; du jardin d'Éden qu'Adam doit " cultiver " et aussi " garder " à la " petite république " que fut la ferme pour Jefferson ; des chambrées et foyers médiévaux au lopin de terre russe ; du jardin ouvrier au jardin thérapeutique ; des " guérillas vertes " aux jardins partagés australiens.
Cultiver la terre n'est pas un travail comme un autre. Ce n'est pas suer, souffrir ni arracher, arraisonner. C'est dialoguer, être attentif, prendre une initiative et écouter la réponse, anticiper, sachant qu'on ne peut calculer à coup sûr, et aussi participer, apprendre des autres, coopérer, partager. L'agriculture peut donc, sous certaines conditions, représenter une puissance de changement considérable et un véritable espoir pour l'écologie démocratique. -
Le rêve du chien sauvage ; amour et extinction
Deborah Bird Rose
- Empécheurs de penser rond
- 6 Février 2020
- 9782359251777
Comment résister à la peur et à l'impuissance que provoquent aujourd'hui les extinctions de masse dans la grande " famille des vivants " ? Deborah Bird Rose nous propose ici de penser, sentir et imaginer à partir d'un terrain concret et situé : les manières de vivre et de mourir avec les chiens sauvages d'Australie, les dingos, cibles d'une féroce tentative d'éradication.
En apprenant des pratiques aborigènes, de leurs manières de se connecter aux autres vivants, elle active une puissance que la Raison occidentale a dévolue aux seuls humains : l'amour. Que devient cette capacité de répondre à l'autre, cette responsabilité, quand elle s'adresse à tous les terrestres ? En s'attachant à des bribes d'histoires logées dans nos grands récits moraux et philosophiques, elle fait sentir que le non-humain continue d'insister silencieusement et que cet appel, perçu par Lévinas dans les yeux d'un chien rencontré dans un camp de prisonniers en Allemagne nazie, n'en a pas fini de nous saisir et de nous transformer.
Il s'agit de faire sentir et aimer la fragilité des mondes qui se font et se défont, au sein desquels des vivants hurlent contre l'inexorable faillite, tressent des chants inoubliables. Les faits parlent d'eux-mêmes, disent parfois les scientifiques de laboratoire. Ici, ils
nous parlent. -
L'effroi et la terreur ; esclavage, poison et sorcellerie aux Antilles
Caroline Oudin-Bastide
- Empécheurs de penser rond
- 7 Mars 2013
- 9782359250725
Une étrange épidémie d'" empoisonnements " s'est répandue dans les Antilles françaises aux XVIII e et XIX e siècles. Les colons prêtent aux " nègres " (sorciers et guérisseurs) une extraordinaire force de nuisance et d'effrayants pouvoirs.L'incapacité de la justice ordinaire à mettre fin au fléau entraîne la création de juridictions spéciales et une répression épouvantable. L'auteure fait la généalogie passionnante de cette grande peur, elle en reconstitue la logique sociale et toute la violence.
Aux XVIIIe et XIXe siècle, un étrange fléau affole les colons des Antilles françaises : le " poison ". Ce terme est souvent associé - voire assimilé - à celui de " maléfices ", les " empoisonneurs " étant d'ailleurs fréquemment dénoncés comme " sorciers ". Les imputations de crime d'empoisonnement participent d'un système de croyances magiques qui amène les maîtres à prêter aux nègres une extraordinaire force de nuisance fondée sur une science botanique occulte associée à d'effrayants pouvoirs. L'effroi qui saisit les colons engendre la terreur contre les esclaves : terreur illégale exercée à titre privé par les maîtres mais aussi terreur légalisée par la création de juridictions spéciales puis par l'instauration d'un impitoyable dispositif administratif de répression. Dans ce livre bouleversant, l'auteure trace avec précision la généalogie de cette grande peur et en reconstitue la logique sociale en s'appuyant sur des récits et des documents souvent totalement inédits. La violence esclavagiste mise en lumière par l'analyse du crime d'empoisonnement est tout autant la violence ordinaire (privations quotidiennes, travail effectué sous le fouet, châtiments corporels banalisés) que celle qui prend les formes les plus cruelles pour signifier aux esclaves que leur sort est entre les mains du seul maître, qu'aucun autre pouvoir (politique, judiciaire ou religieux) ne peut leur venir en aide. -
Hans : le cheval qui savait compter
Vinciane Despret
- Les Empêcheurs de penser en rond - Seuil
- 25 Juin 2015
- 9782846711821
En septembre 1904 à Berlin, un cheval, dénommé Hans, suscite une des controverses les plus vives qui aient agité l'Allemagne à cette époque. Selon son maître, Hans peut résoudre des problèmes arithmétiques, reconnaître des couleurs ou des cartes à jouer, épeler les lettres d'un mot, donner la date du jour ou désigner une personne d'après sa photo. S'agit-il d'une fraude ? d'une " révolution " quant à l'intelligence des animaux ? ou Hans est-il télépathe ? Une commission est mandatée pour évaluer les compétences du fameux cheval. Surprise: Hans répond aux questions qui lui sont posées, même en l'absence de son maître. Aurait-il appris à lire des signaux que les humains lui enverraient inconsciemment ? Ou, les humains, toujours inconsciemment, l'auraient-ils influencé?
Une aventure passionnante, qui nous fait revivre les premiers moments de la psychologie expérimentale, ses questions, ses enjeux, l'originalité et l'inventivité de ses acteurs, le talent de ses sujets et l'engagement de ses scientifiques.
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Ce que les savants pensent de nous et pourquoi ils ont tort ; critique de Pierre Bourdieu
Pierre Verdrager
- Empécheurs de penser rond
- 12 Mars 2015
- 9782359251050
Une violente remise en cause des présupposés de la "sociologie critique" de Bourdieu, coupable de déposséder les dominés et les militants de leur force critique et politique. (Cette édition numérique reprend, à l'identique, l'édition originale de 2010).
La sociologie de Pierre Bourdieu, qui s'est imposée bien au-delà du monde universitaire, est devenue incontournable. Et, dans le même temps, l'homme était devenu un défenseur des dominés et des opprimés, un militant de justes causes. Ce livre reprend tous les grands chantiers ouverts par le sociologue, mort en 2002 ? les femmes, les classes populaires, les sciences, l'Algérie, l'épistémologie ? afin de bien comprendre son mode d'exploration du monde. En confrontant les positions de Bourdieu à celles d'autres chercheurs, Pierre Verdrager fait apparaître des traits permanents qui caractérisent la " sociologie critique " qu'il a fondée : une sociologie qui requiert des gens capables de trop peu, vulnérables en tout, mais des sociologues capables de tout et vulnérables en rien ! C'est le paradoxe du libérateur qui est contraint, pour libérer, d'aliéner ; mais aussi de s'aliéner, s'interdisant de voir que, dans bien des circonstances, les acteurs sont tout à fait capables de se libérer sans lui. Contraindre les acteurs à ne pouvoir faire autrement que d'en appeler à un sociologue incapable de les voir autrement qu'incapables, telle est la violence symbolique dont se rend responsable le sociologue critique. Ce livre s'adresse d'abord aux acteurs et aux militants. En effet, il n'est pas certain qu'on doive considérer comme un bon guide quelqu'un qui ne croyait pas en l'intelligence des gens, qui faisait dépendre le changement social de la survenue de miracles, qui considérait toute prise de conscience comme une impossibilité et qui disait pis que pendre des associations. Les militants n'ont pas besoin de guide ni d'homme providentiel capables d'indiquer ce qui est à faire : la science peut sans doute informer modestement l'action, certainement pas s'y substituer. La pédagogie ne remplacera jamais la politique. Tout compte fait, ce dont les acteurs ont d'abord besoin d'être libérés, c'est d'une sociologie critique qui se sent autorisée, au nom de son savoir accumulé et de ses " méthodes rigoureuses ", à les penser incapables de toute critique. (Cette édition numérique reprend, à l'identique, l'édition originale de 2010).